dimanche 14 juin 2015

VOLONTAIRE DANS L'HUMANITAIRE : ALLEZ, UN PEU DE BONNE CONSCIENCE !

















Et si vous étiez quelqu’un de bien ? Si vous étiez une personne formidable qui au moment de choisir sa voie a décidé de balayer d’un revers de la main les horribles mots « gain », « profit », « hiérarchie », « capitalisme sauvage » ?

Si votre vocation était l’humanitaire ?

Quelle belle voie . Quel courage de dédier sa vie aux autres, d’accomplir des miracles pour que se dessine un sourire sur le visage marqué d’un être en souffrance. Grâce à vous, uniquement à vous.
Comment peut-on vouloir faire autre chose de sa vie ? Quels monstres d’égoïsme sont alors tous les autres ?

Attention, la décision n’est pas anodine, c’est un engagement presque définitif, sauf si malins comme vous êtes, vous réussissez après une telle expérience à vous valoriser auprès de futurs employeurs sur les valeurs de courage, don de soi et solidarité. Un peu cynique mais bon, pourquoi pas.

La décision est prise ? c’est parti ? Alors adieu rêves de fastes et de dorures, d’hôtels de luxe et d’airport lounges, d’interminables buffets de petits déjeuners et mules douces et molletonnées dans le placard, à disposition . Et en avant pour l’aventure, une vie dédiée aux autres, une vie qui rendra fières toutes vos relations, fera sangloter votre maman à l’évocation de votre héroïsme car déjà petit vous prêtiez vos jouets au fils de la gardienne !

Mais ne vous emballez pas, tous les engagements humanitaires ne se valent pas et il va falloir trouver votre place. Il ne s’agit pas de parader dans les couloirs de la fac avec un pull trop long informe, un chèche et des leçons de morale et de bonne conscience à dispenser à tous ceux qui auraient l’outrecuidance d’aspirer à une vie égoïste et hédoniste.

Etes vous seulement capable, assez fort pour pouvoir affronter les contraintes et les engagements d’une vocation humanitaire ?

Etes-vous capable d’intégrer une organisation qui s’inscrira quoiqu’il arrive dans une de ces 3 catégories :

1/ Humanitaire de faux cul :

C’est celui de la bonne conscience, celui qui ne vous obligera pas à faire de votre vie une dévotion idéologique aux autres, un humanitaire bon tein et bon ton. Vous pourrez doser votre engagement au gré de vos envies, de vos besoins en bonne conscience et surtout de votre emploi du temps. Il vous permettra en outre de pouvoir raconter vos exploits, ou mieux, de faire semblant de ne pas avoir envie de les raconter mais de vous arranger pour que quelqu’un d’autre s’en charge.

De plus, cet engagement humanitaire vous permet de rester cantonné à votre région, votre département et même votre commune si vous le souhaitez.

Il est très couru parce qu’il est sur-représenté dans les médias et toutes les personnalités ayant eu droit à au moins 4 photos dans Voici ou Closer  s’y collent et sont même prêtes à offrir un Euro par album vendu à la cause, leur cause.

Et vous, anonyme au cœur gros comme ça, vous pouvez l’espace d’une action être comme Gregoire, Mimmie Mathy, Zazie, Zaz, même pas Zizi Jeanmmaire, Amel Bent ou Bruel, et tous les autres qui ne supportent pas de voir des gens avoir faim, d’autres être pauvres, certains les deux même ! Ces magnifiques, ces justes,  sont prêts à offrir leur talent pour apparaître dans un album qui sera vendu à plusieurs millions d’exemplaires, participer à un show qui rassemblera plus de 10 millions de téléspectateurs lors de sa diffusion sur TF1 , et surtout, surtout ne pas considérer cette participation comme une formidable mise en lumière et une aide majeure à un bond de leur côte de popularité auprès des français. Non, certainement pas, on ne soupçonnera jamais une maison de disques ou un producteur de considérer ces moments d’exposition exceptionnels comme une étape idéale pour la promotion d’un artiste. Non, jamais, c’est mal de penser ça.

Et donc vous, vous pourrez aussi être bénévole pour les Restos du Cœur ou accompagner les volontaires de la Croix Rouge pendant leurs marraudes, offrir du café et du réconfort aux clochards , comme Adriana .

Vous pourrez arriver en retard à vos dîners dans des immeubles cossus du 7ème arrondissement et rater le débouchage du Veuve Cliquot 87 sans que personne ne vous en veuille car vous faites preuve de tellement de courage.

Hier encore vous avez vu des pauvres et leur avez parlé. Aujourd’hui vous avez porté un caddie plein de conserves de cassoulet et des pâtes Panzani aux Restos. Demain vous irez au Zenith soutenir l’action des Restos et bénéficierez d’un clin d’œil complice de La Fouine car vous portez le badge «volontaire». 

Vous êtes un enfoiré, une enfoirée, vous faites partie de la grande famille des enfoirés.

La France vous a très vite adulés, vous, les enfoirés modèles, même si au démarrage de la tournée les caissières de la FNAC en avaient un peu assez que trop de clients leur demandent des places pour « La tournée des enculés » (anecdote véridique !).

Demain, vous refuserez quand même poliment la sollicitation d’une dame qui s’occupe de personnes âgées seules et Helzheimer dans un foyer aux conditions d’hygiène douteuses en raison du manque de moyens car vous ne pouvez pas vous occuper de tout. Et qu’Hélène Segara et Garou ne sont pas là en plus.

Et jamais vous ne vous poserez la question : « Mais pourquoi, alors que des centaines d’associations ont besoin de soutien d’image et de soutien financier, pourquoi toutes les têtes d’affiche se rassemblent autour d’une seule et même cause ? Pourquoi Garou par exemple, qui a lui une présence média importante et n’a pas besoin des Restos pour exister, contrairement à d’autres, pourquoi ne va-t-il pas s’engager pour une cause sans soutien ? »

Donc si vous faites partie de cette catégorie, et que vous voulez vous acheter une bonne conscience sociale, côtoyer des stars et pas trop vous impliquer, vous avez le choix entre les Restos, la Croix Rouge, et le Sida dont le port du ruban est aujourd’hui plus valorisant que celui de la rosette.

2/Humanitaire bobo en afrique :

Ba-ba-car, où es-tu où es-tu ?

Le voilà le vrai bon vieil humanitaire des années 80 et 90 !!!! Celui qui s’est fait ringardiser par les Restos alors qu’entre Band Aid, l’Ethiopie, les méga concerts, les tubes internationaux, on avait tout ! Mais la recette a été piquée par les Restos, moins engageant de rester en France que d’aller risquer de se faire piquer par un moustique gros comme un albatros dans un village de huttes et de choper un SRAS ou un Ebola.

Mais c’est encore possible et vous aurez encore une reconnaissance énorme de votre milieu d’origine si vous allez construire des écoles, creuser des puits ou assainir des rivières en Afrique.

Même si vous tomberez toujours à votre retour sur le connard qui sait tout, prêt à tuer s’il trouve une rayure sur sa Carrera , mais qui vous fera la leçon en vous expliquant qu’il vaudrait mieux leur apprendre à pêcher plutôt que de leur donner du poisson.

Mais vous le faites quand même, par périodes, vous partez quelques semaines, plusieurs mois, et vous revenez différent. Vous avez compris le sens de la vie. Vous pouvez facilement vous frédériclopezizer maintenant. Vous avez des choses à raconter.

Vous avez fait l’Afrique.
Vous vous êtes mis en danger quand même ! c’est sérieux l’Afrique ! un jour on vous a dit qu’un léopard trainait dans le quartier et vous avez même croisé une milice armée !
Quand vous êtes parti, les enfants du village couraient après la voiture jusqu’aux grilles du Sofitel pour vous dire au revoir.
C’était beau.

La faim dans le monde , ça vous révolte. Mais vous savez quoi ? Ce qui est terrible pour vous ? Le problème de la famine existe toujours, mais il est largement passé de mode. Un peu comme un clip de France Gall.

3/  LE vrai humanitaire insoutenable :

Exemple 1 : Les clowns des hôpitaux, véritables héros des temps modernes, intermittents qui prennent sur leur temps pour accomplir cette insoutenable tâche consistant à faire rire des enfants dont certains n’ont plus que quelques jours à vivre. Et qui ont comme temps médiatique le millionième des candidats de Secret Story. Et les présidents de TF1, France 2 ou  M6 se regardent encore dans leur miroir.

Exemple 2 : Passer sa vie dans un mouroir en Inde, et là…on est plus proche de Georges Romero que de l’Abbé Pierre, croyez-moi.

Attention, là, on touche au graal de l’humanitaire, le truc qui te retourne le bide en moins de deux. C’est pas un clodo bourré Avenue Montaigne ou une famille de maliens enflés par un vendeur de sommeil. Ici, on parle d’un autre niveau, c’est la Champion’s league de l’horreur, Les Oscar du désespoir.

C’est pas du petit moignon sympathique qu’on serait prêt à câliner, c’est du gros bras coupé, pas désinfecté depuis quelques semaines au cas où par 38° et 75% d’humidité ça pourrait s’arranger, et gardé au frais part 25000 petits vers tout blancs qui présentent l’avantage de bouffer les peaux mortes et qu’il va falloir nettoyer, désinfecter, panser. Je panse donc j’essuie.
Les fers à repasser, c’est pas du Rowenta bien glissant après 2-3 pschitts de Fabulon bien dosés pour chemise de cadre moyen, c’est deux vieux fers en fer qui servent d’appui pour compenser l’absence de guiboles. Et ne croyez pas que c’est l’exception, y en a une légion de culs-de-jatte devant la porte du dispensaire , avec un bruit on croirait entendre arriver la cavalerie du Général Custer sur du bitume, tous là pour se faire refaire les pansements, et hop, encore du moignon bien durci.
Le mec qui débarque avec ses deux bras et ses deux jambes il est regardé de traviole comme si un mec venait chercher à bouffer aux Restos du Cœur en Lamborghini. Et pourtant,celui-là, il a un œil qui pendouille parce qu’il est sorti de son orbite après une rixe au sujet d’une pomme qui avait été partagée plutôt deux tiers que fiftififti.
Du centenaire incontinent et coprophage, du morveux affamé, du quadra lépreux qui voit ses doigts tomber comme des Herta dans un hachoir, des mecs qui ont cru bon de se désaltérer en buvant l’eau du Gange et qui se retrouvent avec le foie comme une passoire et des parasites gros comme des rats dans le bide… J’en passe et des plus séduisants.

Et vous, pompier de l’horreur, vous serez là en vous demandant comment vous avez pu hurler à la mort quand vous vous êtes cogné le petit doigt de pied à l’armoire en vous levant un mois plus tôt (même s’il faut admettre que cette douleur est insoutenable et que le lépreux, sans armoire ni doigts de pieds ferait bien parfois de considérer le verre à moitié plein), ou que vous avez engueulé votre femme parce qu’à chaque fois qu’elle revient de la laverie automatique, sur vos 12 paires de chaussettes, 6 sont rentrées seules (il faut dire qu’il s’agit là d’un vrai mystère plus étrange que Roswell et le triangle des Bermudes réunis).

Alors, et seulement alors, lorsque vous aurez passé une partie de votre vie aux côtés de ces malheureux, vous pourrez dire : je fais de l’humanitaire. D’ailleurs vous savez quoi ? vous n’en parlerez même pas, vous.

4/ La Défense des animaux : ça ne compte pas, c’est pas de l’humanitaire, de l’animalitaire éventuellement. Mais ça ne rentre pas dans la catégorie des métiers à ne pas faire, au contraire.


ALORS CHOISISSEZ VOTRE PROPRE COMBAT !

Si vous voulez vraiment donner un sens à votre mission humanitaire et n’avez pas le courage d’aller œuvrer à Calcutta, alors de grâce, soyez originaux, inventez l’humanitaire du XXIème siècle, inventez vous des missions pour ceux qui en ont aussi besoin, les petits africains s’en sortiront même sans votre bienveillance, les bras des lépreux des mouroirs de Calcutta tomberont , que vous y accoliez votre sparadrap ou pas.

2 exemples de causes non défendues :

Aidez les spectateurs présents sur les plateaux des émissions de télé à sortir de leur addiction à vouloir passer à l’écran derrière des sous-stars dont ils applaudissent les moindres vannes avec entrain pour obéir au chauffeur de salle, comédien raté qui en rajoute pour être repéré par les invités en place qui s’en tapent puisqu’ils sont les seules personnes qui les intéressent.
Si la vanne n’est pas drôle, c’est pas grave, on applaudit.
Si elle est vaguement drôle, et qu’en plus s’y est caché un petit jeu de mots qui fait donc penser que l’invité est drôle , connu ET lettré (il a lu un livre quoi), alors là c’est applaudissements + « ooohhhhhh ».
Si la vanne est vraiment très drôle, pas de différence avec la vanne pas drôle, on applaudit.
Et alors s’il n’y a pas de vanne mais qu’un acteur, ou mieux, un humoriste, s’énerve et prend la parole sur un sujet de société qu’il condamne, sur lequel il ne lâchera rien, et s’il doit n’en rester qu’un pour se soulever et monter des barricades, ce sera lui, comme par exemple la pauvreté, la guerre, le racisme, l’antisémitisme, le fascisme même , alors là c’est standing, applause, émotion, moue révélatrice de la réflexion « quel courage ! ».

Ou alors, autre combat humanitaire à mener, aidez les grands par exemple !
Personne ne fait rien pour les grands ! Vous vous rendez compte de la difficulté d’être grand dans la vie?
A tous les niveaux ! Il faut passer sa vie à se baisser, on ne peut plus entrer dans les voitures urbaines type Smart sans devoir accomplir un numéro de contortionniste , les enfants vous prennent pour Robert Wadlow 2,72m dans le Guiness Book, vous passez votre enfance avec des copains trop petits et des pantalons trop courts, vous gênez tout le monde au cinéma et dans les concerts, on vous prend systématiquement dans les équipes de basket alors que vous n’aimez pas forcément ce sport, au foot on vous met direct dans les buts, et si en plus vous êtes gros, allez hop, en mêlée, vous vivez un calvaire dans les avions des compagnies low costs, vous pénalisez vos parents qui n’ont plus aucun argument pour vous obliger à manger de la soupe,  et surtout, les gens vous parlent de votre taille, en permanence, pensant que c’est une chance.

Tous ces désagréments, les petits ne les connaissent pas.

Vous avez déjà vu des personnes dire à une autre de petite taille qu’ils croisent dans un magasin : «Ouh la laaaaa ! qu’est ce que vous êtes petiiiiiit ! C’est incroyable d’être aussi petit, vous mesurez combien ? Vous devez être fort … Boyard !!!!!  Warf warf warf ! ça va je plaisante ! ». Cela n’arrive jamais.
Alors que pour les grands, systématiquement on les met face à leur handicap : « Ouh la laaaaa ! qu’est ce vous êtes grand ! Vous mesurez combien ? Vous jouez au basket ? Il fait beau là-haut ? Tu viens faire un tour… Montparnasse ? warf warf warf ! », et ça, le grand le vit chaque jour.
Alors pourquoi pas aider les grands ?


Bref, votre humanitaire, choisissez-le bien.

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