samedi 13 juin 2015

HOTESSE DE L'AIR : ET VOS RÊVENT S'ECRASERONT TRÈS VITE !



« Toute ma vie, j'ai rêvé
D'être une hôtesse de l'air.
Toute ma vie, j'ai rêvé
De voir le bas d'en haut.
Tout ma vie, j'ai rêvé
D'avoir des talons hauts.
Toute ma vie, j'ai rêvé
D'avoir, d'avoir
Les fesses en l'air. »

Il ne croyait pas si bien dire le bon vieux Jacques. Tellement de candidates, et de candidats aussi, mais bien plus de candidates quand même.

Cette vie de voyages et d’aventures, de talons hauts et de fesses en l’air, combien en rêvent ?

Alors là, autant vous dire que ma tâche est aisée sur ce métier.  Et toutes les bonnes raisons de le fuir.

On a parfois l’impression que les jeunes candidates qui se destinent à cette carrière n’ont pas réussi à être chanteuses, actrices ou mannequins, et qu’il reste donc ça. Avec la possibilité de se faire repérer, sait-on jamais.

Le meilleur moyen d’illustrer au mieux la désillusion de ce métier est de raconter ce que serait la vie rêvée d’une hôtesse de l’air et d’enchaîner immédiatement avec ce que risque fort d’être cette vie, en vrai.

1/ La vie rêvée :

« Bonjour, je m’appelle Emma, toute ma vie j’ai rêvé d’être une hôtesse de l’air (ça commence bien…).
Après quelques entretiens durant lesquels j’ai dû faire valoir mes diplômes , ma plastique et ma maîtrise correcte de l’anglais, j’ai été recrutée comme hôtesse sur une grosse compagnie aérienne.
Je travaille par rotations. Pour l’instant , je ne fais que des vols en Europe mais dans 3 ans, je serai affectée à des longs courriers qui me permettront de découvrir le monde.
Le temps que je passe au sol entre mes vols me permet, une fois reposée, de voir mes amis. J’en ai d’ailleurs profité pour rencontrer un mec super avec qui je vais me marier. On pourra voyager partout vu que je ne paye que 10% des billets d’avion.
Je serai à la retraite vers 45 ans et je resterai salariée de ma compagnie avec tous mes avantages acquis, jusqu’au bout .

Ma vie est magnifique. Quel bonheur. Quelle joie . Jesus Marie Joseph. »

C’est bon ? vous avez assez rêvé ? Alors passons aux choses sérieuses :



2/ La vie très probable :

« Bonjour, je m’appelle Bénédicte, toute ma vie j’ai rêvé d’être hôtesse de l’air (aussi ?).
Comme je suis pas trop mal, je suis quand même arrivée première dauphine à l’élection de Miss Côte d’Opale il y a 5 ans, ça a été plus facile d’y arriver.
Maintenant, j’ai 25 ans, et je suis hôtesse de l’air.
Je n’ai pas à me plaindre je travaille beaucoup. Décollages, atterrissages, redécollages, re-atterrissages, servir des verres aux passagers, ramasser leurs papiers, nettoyer le vomi des malades, déjeuner des boîtes bouillies de poisson ou de boeuf mal assise sur un coin de siège, c’est le travail, mais c’est le prix du voyage. Et c’est beau les voyages.

Alors d’accord j’ai 25 ans… et j’ai des varices.

Mais c’est normal, au début, pour paraître plus séduisante j’ai refusé de porter ces immondes bas de contension que les anciennes me conseillaient de porter.

Alors là mon phlébo (on a toute un phlébo quand on est hôtesse, c’est un peu comme avoir un psy quand on est actrice ou un kiné quand on est sportive de haut niveau) m’a dit que j’allais avoir des problèmes de circulation.

Bon, comme j’ai de l’humour je lui ai dit que je n’étais pas gendarme au carrefour mais hôtesse de l’air et que dans le ciel, des problèmes de circulation on en avait pas !!!!

On a bien rigolé, et après donc, quand on s’est rhabillés et qu’il m’a dit qu’il ne comprenait pas ce qui lui avait pris parce qu’il aimait vraiment sa femme, mais que le fantasme de l’hôtesse de l’air était plus fort que tout même si ça devait être bien plus excitant encore de me culbuter en vol, il m’a bien dit de faire attention parce que les varices c’est pas réservé qu’aux vieilles.

J’aurais dû l’écouter.

Ensuite il m’a conseillé de revoir un phlébologue régulièrement mais pas lui parce qu’il ne voulait plus fauter. Comme si moi j’aurais pas eu mon mot à dire. Les mecs je vous jure…

Il faut dire qu’à sa décharge, si je puis dire, je dois reconnaître un truc, c’est que le fantasme de l’hôtesse de l’air c’est pas une légende.

A votre avis, quel est le pourcentage d’hommes qui me matent le cul quand je suis entrain d’essayer de me frayer un passage avec mon gros chariot entre les deux rangées de sièges ? Alors ? 100 % ! Si on compte les stewards ça fait baisser la moyenne c’est sûr, mais alors niveau passagers c’est un truc de dingue.

Et c’est drôle parce qu’il existe vraiment plusieurs catégories :
-Il y a ceux qui assument carrément. Eux, je passe avec mon chariot, ils me sourient en face, et ils anticipent déjà le mouvement de tête qui bascule vers le couloir pour mieux me mater.
-Il y a ceux qui aimeraient assumer mais malheureusement ils sont avec leur femme. Alors ils ont leur journal, ils font comme si de rien était, et comme par hasard, quand je passe, ils sont concentrés sur l’article en haut à droite ou en haut à gauche de la page (en fonction de leur position dans l’avion), et comme par hasard encore la page a une fâcheuse tendance à se plier une fois que je les ai dépassés. Incroyable non ?
-Et il y a ceux qui ont besoin de toucher, mais ils savent qu’ils n’ont pas le droit, ils savent bien qu’ils ne coucheront pas facilement avec nous, encore moins dans un avion où pour pouvoir prétendre à un quelconque droit de cuissage il faut au moins porter une casquette de la compagnie et un maximum de barrettes sur l’épaulette. Ceux-là, quand on passe, comme par hasard eux aussi il y a leur coude qui tombe de l’accoudoir et vient frotter notre cul.
Et plus ils ont de miles, plus leur technique est affutée.
Je savais pas que ça excitait les mecs de frotter un cul avec leur coude.

Donc ça existe bien ce fantasme et si on veut résumer, en gros on se fait mater par les passagers, tripoter par le co-pilote, et généralement sauter par le pilote.

Bon, c’est un rythme à prendre.

Et puis en ce qui me concerne, ce rythme, il faut le prendre vite parce que je suis hôtesse sur des petits courriers .

Là, ça va faire un an que je fais une semaine sur deux, 4 fois par jour, Paris-guingamp-Paris- Guingamp-Paris-Guingamp.
Alors d’accord c’est pas Rio ou Los Angeles.
Toutes celles qui font ces destinations, on le sait, c’est les vieilles ou les filles faciles.
Et elles se prennent de ces décalages horaires… crevées ! et c’est plus des varices qu’elles ont, c’est des popcorns !

Tout ça pour aller au bout du monde et rester 6 heures sur place, suuuupeeeer !!!!

Bon, il y a d’autres avantages dans notre métier…ah non, avant il y a un super inconvénient.

C’est les accidents, les crashs, on est quand même vachement plus exposées que les passagers.
Pas parce qu’on est assises dos au sens de la marche, mais parce qu’on passe beaucoup de temps en vol.
En moyenne, il y a un accident toutes les 2 millions d’heures de vols dans le monde.
Moi, je vole 40 heures par mois, près de 500 heures par an.
Ça fait que j’ai 50 fois plus de chances de me crasher que quelqu’un qui part à 5 heures de vol de chez lui aller-retour (soit 10 heures) une fois dans l’année.
Il est pas inattaquable ce calcul ?

Et oui, nous faisons un métier à risque.

Maintenant je vais vous livrer un secret. Mais vous le répétez pas : les consignes qu’on donne au début, avec le gilet, le sifflet, les issues de secours et les masques, et ben quand ton avion il tombe de 2000 mètres d’un coup et qu’il s’écrase comme une merde dans un champ, ça sert à rien. Le répétez pas trop, ça dévaloriserait énormément cette partie de notre travail avant que les vols ne commencent.

A part ça, franchement, la vie elle est cool. Et puis quand t’es trop vieille, vers 40-45 ans, et surtout que t’en peux plus , épuisée par ce que tu as infligé à ton corps , tu bascules de PNC (personnel navigant cabine), à PAS (personnel au sol).

Là tu travailles jusqu’à ta retraite au comptoir à enregistrer les bagages de tous les français. Vous savez, les voyageurs français,  tellement reconnus pour être respectueux de tout dès qu’il s’agit de partir en vacances que t’es contente quand ce que tu te prends dans la gueule se limite à des postillons.

A part ça c’est cool.

Ah oui autre chose pardon j’allais oublier, vous savez que quand on est hôtesse on fait pas la queue pour les bagages et toutes les formalités ? c’est cool non ? »

Franchement ? non, c’est pas cool.

Je ne vois pas comment on peut rêver toute sa vie d’être une hôtesse de l’air. Ça me paraît surréaliste.

Après, à vous de voir si vous risquez le scénario 2 en rêvant au scénario 1. Un peu comme la jeune chanteuse qui se rêve à l’Olympia et termine à la salle des fêtes de Brignoules. Et je peux vous garantir que ce sont les plus nombreuses !"

Bon vol !!!!



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