dimanche 14 juin 2015

PHARMACIEN : UN MÉTIER POUR MEDECINS RATÉS





A priori, pharmacien est un métier respectable.

D’ailleurs, les pharmaciens sont respectés.

Il y a de quoi, les pharmaciens, en plus d’être souvent des substituts à nos médecins généralistes se muent souvent en assistants sociaux.

Le pharmacien, c’est le nouveau médecin de campagne. Celui à qui on se confie. Celui à qui l’on raconte toutes ses petites misères. Et même les grandes . Surtout les grandes misères, celles des autres de préférence. C’est pas un curé non plus le pharmacien, il est capable de répéter lui ! Alors autant parler des hémorroïdes du voisin que de ses propres varices.

Le pharmacien se doit d’être patient. Très patient. Presque aussi patient que celui qui fait la queue dans son officine en attendant son tour derrière une personne âgée.
Là, ça peut prendre des heures.

Déjà parce que la personne âgée se pointe forcément avec une ordonnance longue comme le casier judiciaire d’Al Capone.

Ensuite parce que cette respectable personne, forcément très seule dans notre civilisation qui place l’ancien dans une posture d’élément perturbateur du bonheur, a très envie de parler à quelqu’un de ses malheurs. Ou des malheurs de ceux qui l’entourent.

Or, dans le quartier, le boucher n’a pas le temps d’écouter et comprend forcément de travers lorsque l’on parle de foie, de côtes, de tripes ou de travers justement ; le boulanger est de toute façon en avance de 2 ou 3 clients par rapport à celui qu’il sert (je suis sidéré par cette capacité qu’ont les boulangers à demander à la personne suivante ce qu’elle veut alors que vous n’avez ni votre baguette ni votre monnaie dans la main) ; et le banquier …on a pas envie de se confier à ces gens là, même à la Poste, c’est dire…

C’est donc au pharmacien que revient l’infime honneur de se plier à cet exercice qui consiste à écouter pendant des heures et des heures les complaintes de nos anciens. Ce qui lui permet d’être largement payé en retour en remplissant abusivement les sacs marqués du caducée. Ce petit sac tout doux sur lequel se toisent et s’enroulent le serpent d’épidaure (bon comme la campagne) et la coupe d’Hygie qui a la particularité de transformer le poison en remède.


Medecins zélés, pharmaciens et patients sont complices et participent au gouffre abyssal de notre bonne vieille sécu mais bon, on leur doit bien ça à nos parents et grands parents. Quoique juste donner le bon nombre de cachets prévus au traitement serait déjà un poste d’économies conséquentes. Quand on doit prendre un cachet par jour pendant 13 jours, n’est-ce pas un peu exagéré de nous vendre 2 boites de 12?

Une fois le sac rempli et l’argent encaissé, ce bon vieux pharmacien, qui n’arrive pas à se débarrasser de cette bonne vieille Raymonde qui vient chaque jour faire un point complet sur toutes ses articulations en attendant du commerçant un remède miracle, commence à arborer son air gêné en vous jetant de petits coups d’œil complices , vous attendez juste derrière. Car vous, pressé et pas dans votre assiette,  attendez pour une simple  boîte de Doliprane ou de Vitamine C, ou juste parce que votre petiot a une gastro et il vous faut un truc d’urgence, car ce petit morveux a fait tomber sa dernière tétine dans le bac à sable plus infesté de microbes qu’un hérisson vivant dans une décharge.

Vous le sentez,  ce pauvre pharmacien, il ne peut rien faire, il est coinçé, il n’en peut plus mais il a prêté serment, le serment de Galien . Même pas celui d’Hippocrate.

Mais tout ça n’est pas grave, il est heureux le pharmacien, il a la belle vie malgré tout, c’est pas si compliqué son boulot.
Si on résume, la vie du pharmacien se répartit de la manière suivante :

1/ Délivrer des médicaments en suivant ce que le médecin a écrit sur l’ordonnance tout en essayant de refourguer du générique, activité qui se résume en une recherche dans les gros tiroirs de pharmaciens, ou mieux, en tapant le nom des médocs sur l’ordinateur et ils arrivent tout seuls via un tube relié à la réserve : 60% du temps de travail (dont 20 à 30% de temps perdu à écouter les vieux).

2/ Vendre de l’aspirine quand un client dit qu’il a mal à la tête, de l’Actifed quand il a le nez pris (de Godard), de l’Immodium ou de l’Ercefuryl quand le client a le temps de venir jusqu’à l’officine, de la Citrate de Betaine quand le client arrive avec les yeux jaunes, de l’Oscillocoscinum quand il arrive aussi tôt,  du parapoux ou du Toplexil, bref, tout ce qui est en vente sans ordonnance : 30%

3/ Vendre des déodorants, des capotes, des bouchons d’oreille, des pastilles pour garder l’haleine fraiche, du dentifrice, des crèmes solaires ou crèmes hydratantes simples, etc… 8%

4/ S’occuper de blessés ou toxicos qui entrent dans la boutique et leur prodiguer les premiers soins. Aaaahhhhhh ! enfin de l’action ! : 1%

5/ User de son savoir scientifique pour concocter des crèmes et des onguents aux formules panoramixiennes : 1%.

Ce qui nous fait donc 98 % de choses que nous serions tous capables d’accomplir à moins d’être incapable de se servir d’un terminal de paiement de carte bleue, et 2% de missions vraiment compliquées pour des gens comme  nous. Sans le diplôme.

Avec à la clef des marges confortables car étant quasiment le seul habilité à vendre la plupart des médicaments, pour l’instant, il se fait bien plaisir sur les marges.

Le partenaire de vos vacances














Donc voilà un commerce rentable, pas trop compliqué à priori car tout le monde est capable de vendre une crème Neutrogena a celui qui arrive avec les mains sèches , et pas trop fatiguant non plus (déjà parce que les clients qui entrent sont normalement un peu malades donc affaiblis et en plus ils gobent à peu près tout ce qu’on leur raconte, pas de contestation mon gars, la blouse, elle est sur mon dos à moi alors ça signifie que J’AI raison !).

Génial !!! on a trouvé le métier idéal ! Allons tous ouvrir notre officine de pharmacien, maman quand je serai grand je serai apothicaire !

Tut tut tut !!!!! pas si vite !!!!

Pour avoir le droit de refourguer du Smecta ou de l’eau précieuse, de discuter pendant des heures avec des vieux, de se faire braquer par des toxicos ou de dire à de jeunes filles un peu trop minces que l’anorexie c’est pas bien, il faut le mériter .
Je m’explique :
Après le bac, entre 6 et 9 ans d’études.

Au programme des réjouissances :
Chimie, chimie organique, biochimie, chimie physique, chimie minérale ;
biologie moléculaire, biologie cellulaire, biologie animale, botanique ;
physique, mathématiques, anatomie, pharmacie galénique ou encore santé publique et  droit économique.
Ça c’est le hors d’œuvre de la première année.

Ensuite, passons sur les stages en officine où vous allez devoir ranger des cartons de médicaments à longueur de journée pour avoir le droit de montrer votre bouille fatiguée au comptoir vêtue de cette magnifique blouse blanche flanquée du sigle « STAGIAIRE » en Tahoma 258 pour bien que tout le monde sache que vous n’êtes rien.

Il faudra ensuite s’intéresser aux matières pharmaceutiques comme la galénique, la chimie thérapeutique, la pharmacologie, la pharmacie clinique, la pharmacognosie, la toxicologie et d’autres matières biologiques ou chimiques spécialisées (bactériologie, virologie, parasitologie, hématologie).

Bref, tout ça pendant minimum 6 ans , qui comme par hasard sont les années entre 18 ans et 24 ans, c’est à dire les années où on ne rêve que de ça, et maximum 9 ans, soit jusqu’à 27 ans.

Quelle jeunesse…

Alors recherchons l’explication de tout ça. Est-ce qu’un pharmacien est comme un kiné, c’est à dire un médecin raté ? Pardon les kinés, je vous aime beaucoup mais on est d’accord que vous avez tous tenté médecine, me trompe-je ?

Si tel est le cas, pourquoi faire autant d’années d’études qu’un médecin pour n’être qu’un simple commerçant et faire chier les gens qui veulent un antibiotique parce qu’ils ont 40 ans et qu’ils savent bien qu’un petit Clamoxyl leur dégonflera les ganglions mais qu’ils n’ont pas le temps de passer chez le doc pour avoir une ordonnance ?

Sans parler des moments d’humiliation : Quand on demande dans un avion ou dans un lieu public en situation d’urgence : Y a-t-il un médecin parmi vous ? Et que vous répondez : moi, je suis pharmacien ! Tout le monde se marre… C’est une vie ça ?

Pourquoi gâcher sa jeunesse en apprenant, entre autres,  les grands principes de la pharmacognosie ?

Ça fait 2 fois que nous abordons cette spécialité, alors comme j’imagine que bon nombre d’entre vous ignore de quoi il s’agit , la pharmacognosie ,  c’est l’étude de ce qu’il y a dans les plantes en poison, venin ou drogues. Il y a les drogues végétales, ça on voit bien ce que c’est, on connaît. Mais il existe aussi dans la nature des drogues animales !… et oui mesdames et messieurs, des drogues animales, et ça, c’est la zoopharmacognosie (256 points au Scrabble !). La zoopharmacognosie… Il existe des drogues animales et on ne le savait pas. Chers amis camés du monde, il est peut être possible de se faire des rails de grenouille, des shoots de zèbre ou de se rouler des pétards au poil de macaque. Et sans la zoopharmacognosie, vous seriez restés comme des crétins toute votre vie à vous demander si l’afghane est meilleure que la pakistanaise ou que la tonkinoise .  Le champ des possibles devient bien plus large que n’importe quel champ de pavot !!!!




VIVE LA ZOOPHARMACOGNOSIE !!!!! (si vous voulez en faire un tshirt, prévoyez uniquement du XXL).

Bref, à moins de vraiment vouloir se pourrir la vie, et quitte à bosser dans le commerce et gagner de l’argent avec son petit bouclard, autant vendre des fringues. Vous n’aurez qu’à glisser une petite boîte de Strepsil à vos clients en cadeau quand ils auront l’air d’avoir mal à la gorge.

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